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Balayer devant sa porte

December 2018
着ぶくれや  そのまゝ門の  外も掃き
Kibukureya
sono mama mon no
soto mo haki
Dans mes vêtements d’hiver
telle quelle au portail
balayant aussi devant lui

Akiko Noguchi

Quelles que soient la saison et l’humeur, on sort, on se montre tel qu’on est, pour faire à l’extérieur ce qu’on accomplit d’habitude plus volontiers à l’intérieur.

Balayer devant notre porte exerce notre esprit critique sur ce que nous mettons en place et communiquons.

Lorsqu’on sort, astique puis range les apriori, croyances, vérités et les émotions que tout cela entraîne, l’ordre retrouvé n’est pas exactement le même. C’est de ce petit décalage que peut surgir la créativité. Mais comment présenter au regard extérieur ces innovations, fruit du long processus qui régulièrement doit se frayer un chemin entre désordre et stagnation ?

Le prosélytisme serait-il une solution ? Personne aujourd’hui ne se pense prosélyte, on préfère parler de charisme, de capacité à convaincre ou de clairvoyance. Mais la frontière est poreuse entre ces attitudes. Il faut une vigilance de chaque instant pour, dans le partage, ne pas être prosélyte à son insu.

Le partage n’est pas une évidence.

Partager une opinion, c’est souvent la renforcer pour le meilleur ou pour le pire. Comment faire la part de conditionnement personnel dans ce que l’on affirme comme une vérité ? Il faudrait éclairer l’opinion d’un regard critique pour qu’elle tienne la route.

Partager des savoirs ? Le grand avantage du « savoir » sur l’opinion, c’est qu’il est distancié de la personne qui le partage. Mais encore faut-il qu’il accepte de se frotter aux autres savoirs et au questionnement.

Partager des questions ? Elles mettent tout le monde sur le starting-block de la pensée. Mais la difficulté est immense. Combien de questions biaisées par une opinion sous-jacente ou de faux problèmes ? Apprendre à poser une question est un art majeur, qu’on l’exerce sur sa propre pensée ou sur celles des autres.

Entre le dehors et le dedans, de chaque côté du portail, le ménage est indispensable. Comment le rendre joyeux et créatif ?

Un artiste excentrique qui dormait sur un banc s’est réveillé un jour couvert de neige: « Tiens, on a changé les draps ! »